Quel est le risque de retour à la peine de mort dans votre pays ?
Cet outil interactif vous permettra d’identifier les niveaux de menace d’une résurgence de la peine de mort dans votre pays. Il s’appuie sur des indicateurs clés tirés de l’expérience du projet pilote de la Coalition mondiale dans trois pays : les Maldives, les Philippines et la Turquie de 2018 à 2021.
Pour chaque série de questions, vous pouvez cliquer sur l’icône pour avoir plus d’informations sur cette question et des exemples concrets des trois pays (Maldives, Philippines et Turquie).
Une fois que vous aurez rempli l’ensemble du questionnaire (6 sous-catégories et 20 questions au total), vous serez redirigé vers une page de résultats qui vous indiquera si le risque est nul, modéré, élevé ou très élevé. Dans les trois derniers cas, vous recevrez également des conseils et des outils pour vous aider à empêcher la réintroduction de la peine de mort dans votre pays. Veuillez noter que cet outil s’adresse principalement aux pays qui ont déjà aboli la peine de mort en droit ou en pratique.
A. Pouvoir exécutif
Le ou la cheffe d’Etat ou un autre organe gouvernemental a-t-il fait des déclarations publiques, plus d’une fois, pour rétablir la peine de mort ou reprendre les exécutions ?
Le président de la Turquie s’est engagé à rétablir la peine de mort à plusieurs reprises pour différents crimes (terrorisme, homicides de femmes, d’enfants).
Le ou la cheffe d’Etat avait-elle·il comme promesse électorale de rétablir la peine de mort ou de reprendre les exécutions ?
Le président des Philippines est un fervent partisan de la peine de mort. Il s’est engagé, depuis son élection, à rétablir la peine de mort.
le président Duterte défend la peine de mort, affirmant que tuer les trafiquants et les consommateurs de drogue est le moyen de rendre le pays plus sûr et plus prospère.
Le ou la cheffe d’Etat, un autre organe gouvernemental ou une autre institution influente ont-ils fait campagne pour que l’opinion publique soutienne la peine de mort ?
Aux Philippines, le président Duterte a profité de ses discours sur l’état de la nation pour se rallier à la peine de mort ; dans un récent discours, il a directement demandé au Sénat pourquoi le projet de loi rétablissant la peine de mort n’avait pas été adopté.
Le président Duterte a également tenu auprès du grand public un discours erroné selon lequel la peine de mort rendrait le pays plus prospère. Il affirme, sans preuve, que le commerce de la drogue dans le pays est à l’origine d’un taux de criminalité élevé et de la pauvreté. Il affirme en outre que la peine de mort est un moyen d’éliminer la drogue.
En Turquie, le président Erdogan utilise la rhétorique et l’imagerie de la violence terroriste et brutale dans ses rassemblements pour renforcer le soutien politique à sa cause.
Aux Maldives, le soutien à la peine de mort est principalement alimenté par le soutien croissant de la majorité des religieux extrémistes. La perception est que quiconque soutient l’abolition de la peine de mort perdra le vote des musulmans.
Le représentant permanent des Maldives auprès des Nations unies a déclaré que la constitution maldivienne stipule que l’Islam est le fondement de toutes les lois aux Maldives et que le code pénal prescrit la peine de mort pour les meurtres conformément à la charia islamique. Sur cette base, il a déclaré que favoriser l’abolition serait à la fois anticonstitutionnel et antidémocratique.
Un organe gouvernemental a-t-il révisé la méthode d’exécution, engagé un bourreau, construit une chambre d’exécution ou pris toute autre mesure concrète pour reprendre les exécutions à court terme ?
L’ancien président des Maldives, à l’été 2017, a menacé de procéder à l’exécution des condamnés à mort du pays dans les deux mois et a informé la nation que la construction d’une chambre d’exécution était achevée.
Le ou la cheffe d’Etat ou le ou la ministre de la Justice a-t-elle·il signé un mandat d’exécution ?
B. Pouvoir législatif
Un·e député·e a-t-elle·il rédigé une proposition de loi visant à rétablir la peine de mort ?
Un projet de loi visant à rétablir la peine de mort a-t-il été mis à l’ordre du jour de l’agenda législatif avec le soutien de l’exécutif ?
Le pouvoir législatif a-t-il adopté des projets de loi rétablissant la peine de mort ?
Un projet de loi visant à rétablir la peine de mort a été adopté par l’une des deux chambres du Congrès philippin. En mars 2021, la Chambre des représentants a adopté le projet de loi 7814, qui rétablit la peine de mort pour des infractions liées à la drogue.
C. Contexte national et opinion publique
Les sondages d’opinion montrent-ils que la majorité des citoyens sont favorables à la peine de mort ?
La majorité des citoyens turcs soutiennent la peine de mort. Dans un sondage réalisé en 2019, 71,7% ont répondu « Oui » à la question « Seriez-vous favorable à la peine de mort pour les crimes de maltraitance d’enfants, de meurtre de femmes et de terrorisme ? »
La majorité des Philippins soutiennent la peine pour des délits mineurs comme le fait de travailler dans des fumeries de drogue ou de vendre de la drogue.
Lors d’une réunion des Nations unies, le procureur général des Maldives a déclaré que la peine de mort ne serait pas abrogée sans une étude approfondie de l’opinion publique sur le sujet.
Des groupes politiques ou religieux influents soutiennent-ils la peine de mort ?
Les groupes religieux extrémistes constituent un énorme obstacle à l’abolition de la peine de mort aux Maldives. Ces groupes ont une grande influence et ont lancé avec succès des campagnes de dénigrement qui ont conduit à la fermeture totale d’organisations de la société civile, qu’ils jugent blasphématoires car ils publient des rapports faisant état d’une radicalisation accrue dans le pays.
D. Société civile
Les groupes de la société civile qui s’opposent au rétablissement (ou soutiennent l’abolition) de la peine de mort peuvent-ils opérer sans risque dans le pays ?
Aux Philippines, des groupes de la société civile existent et ont organisé des événements pour empêcher le rétablissement de la peine de mort, mais ces groupes sont tous la cible de cyber-attaques. Beaucoup pensent que ces cyber-attaques sont financées par le gouvernement.
La Turquie court un plus grand risque, car aucun groupe de la société civile ne peut fonctionner dans le pays en raison du degré de contrôle du gouvernement et de l’absence de liberté d’expression.
Les organisations de la société civile aux Maldives courent le plus grand risque ; des groupes extrémistes religieux non seulement poursuivent les cyber-attaques contre les groupes abolitionnistes, mais ont également suivi physiquement et fait circuler les informations personnelles des personnes qui soutiennent l’abolition de la peine de mort aux Maldives. Le personnel de la fonction publique fait régulièrement l’objet de menaces de mort en ligne, même après avoir quitté le pays.
Les organisations de la société civile qui font campagne contre la peine de mort sont-elles victimes de harcèlement, d’arrestations et de fermetures ?
En Turquie, les autorités ont arrêté et jugé Taner Kilic, président honoraire d’Amnesty Turquie, et Idil Eser, ancien directeur d’Amnesty Turquie, pour des motifs liés au terrorisme. La décision finale de l’affaire a été reportée en raison de l’épidémie de Covid-19, mais la motivation est clairement une intention de museler la société civile.
1 500 avocats spécialisés dans les droits de l’homme ont été jugés pour des délits liés au terrorisme. Les associations du barreau ont travaillé activement sur la peine de mort et sont confrontées à de très graves violations des droits de l’homme, notamment des intimidations, des saisies illégales et des surveillances.
Aux Maldives, MDN a été interdit pour des accusations liées au blasphème.
E. État de droit et pouvoir judiciaire
Le gouvernement respecte-t-il les lois existantes ?
Aux Philippines, le président a menacé de modifier la constitution du pays pour rester au pouvoir plus longtemps. La guerre du président contre la drogue a également entraîné une recrudescence des exécutions extrajudiciaires.
En Turquie, le Parlement a élargi le champ d’application du crime de terrorisme dans son code pénal pour inclure certains types de discours, ce qui expose les journalistes, les avocats et les groupes de la société civile à des accusations de terrorisme.
L’institution nationale des droits humains est-elle indépendante (accréditation A selon le GANHRI) ?
Aux Philippines, la Commission des droits humains est totalement indépendante, avec une accréditation A du GANHRI, et joue un rôle de premier plan dans la lutte contre le rétablissement de la peine de mort.
En Turquie, il n’y a pas d’INDH.
Aux Maldives, la Commission des droits humains des Maldives a une accréditation B de GANHRI. Son énoncé de mission se lit comme suit : « Diriger la promotion et la protection des droits humains en vertu de la Constitution des Maldives, de la charia islamique et des conventions régionales et internationales sur les droits humains ratifiées par les Maldives. »
Pour en savoir plus sur le système d’accréditation du GANHRI et savoir si l’INDH de votre pays a une accréditation « A »
La Cour suprême ou constitutionnelle est-elle indépendante du pouvoir exécutif ?
F. Engagements internationaux
Le pays s’est-il récemment retiré d’un traité international auquel il était auparavant partie ?
En 2019, les Philippines se sont retirées de la Cour pénale internationale, car la Cour enquêtait sur des accusations de crimes liés à la campagne de lutte contre la drogue du président Duterte.
En mars 2021, la Turquie s’est retirée de la Convention d’Istanbul visant à protéger les femmes contre toutes les formes de violence, et à prévenir, poursuivre et éliminer la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. La Turquie avait été le premier pays à ratifier la Convention en 2012.
Le gouvernement a-t-il montré une volonté de résister à la pression internationale dans un passé récent ?
Après avoir promis de voter en faveur de la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies intitulée « Moratoire sur l’application de la peine de mort », le représentant maldivien a procédé à un vote contre la résolution le mois suivant.
Human Rights Watch a noté la réputation croissante des Philippines en tant que « paria international des droits humains » après que le pays se soit retiré de la Cour pénale internationale en 2019 et ait lancé une campagne de désinformation au Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
Amnesty International a noté que le système judiciaire turc ne tenait pas compte des garanties d’un procès équitable et de la régularité de la procédure et continuait d’appliquer des lois antiterroristes au sens large pour punir des actes protégés par le droit international relatif aux droits humains. L’organisation a également noté les condamnations sans fondement de plusieurs défenseur·euse·s des droits humains dans le pays.
Le pays a-t-il voté en faveur de la plus récente résolution moratoire de l’AG de l’ONU ?
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Le pays fait-il partie du système SPG+ ?
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Le pays est-il un État partie à un traité international et/ou régional visant à abolir la peine de mort ?
La volonté des présidents turc et philippin de rétablir la peine de mort violerait le deuxième protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont les deux pays sont membres.
La Turquie a également ratifié le Protocole n° 6 et le Protocole n° 13 de la Convention européenne des droits de l’homme.
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